mardi 21 juin 2016

Célibataire longue durée, Véronique POULAIN



Quatrième de couverture :

À la veille de ses cinquante ans, Vanessa Poulemploi, la bien nommée, va devoir relever un triple défi : trouver du travail, un sens à sa vie et... se marier. Autant vous dire que ce n’est pas gagné.

216 pages, Éditions Stock, mai 2016



Ce que j’ai pensé de cette lecture :

vendredi 17 juin 2016

La Lune et le Roi-Soleil, Vonda MCINTYRE



Quatrième de couverture :

En 1693, le père jésuite Yves de La Croix, explorateur au service du roi Louis XIV, ramène à Versailles un couple de mammifères marins capturés dans les mers du Nouveau Monde. L’un d’eux succombe, tandis que l’autre, la femelle, survit et provoque l’ébahissement général. Marie-Josèphe, la jeune sœur du religieux, qui se voue à l’étude des sciences naturelles loin des intrigues de la cour, devient l’intermédiaire entre les humains et la créature aussi laide que son chant est beau. Protégé par le roi vieillissant qui espère découvrir le secret de l’immortalité, Yves cherche à percer les mystères de la voix divine de l’étrange sirène. Mais revendiquer l’intelligence de cette créature est un grave défi aux conventions aristocratiques et à l’obscurantisme chrétien. Conte tragique où vérité historique et imaginaire se mêlent et se côtoient, La Lune et le Roi-Soleil est aussi un plaidoyer pour la tolérance et la liberté.

672 pages, Éditions Le Livre de Poche, mars 2016



Ce que j’ai pensé de cette lecture :




vendredi 10 juin 2016

Nuit de septembre, Angélique VILLENEUVE



Quatrième de couverture :

« Une nuit, ton fils s’est tué dans sa chambre, au premier étage de votre maison. Au matin à huit heures, avec son père tu l’as trouvé.
Depuis, à voix basse, tu lui parles. Tu lui demandes s’il se souvient.
La mer étale à huit heures du soir, les talus hérissés d’iris, les pierres de la cour tièdes sous la peau du pied, les filles dont les yeux sourient, toutes les choses belles et la lande silencieuse.
Tu espères tant qu’il est parti gonflé d’elles. Mais comme tu n’es pas sûre qu’en aide, en ailes, ces choses lui soient venues cette nuit-là, tu les lui donnes par la pensée, la respiration, le murmure. »

160 pages, Éditions Grasset, mars 2016



Ce que j’ai pensé de cette lecture :

La perte d’un enfant, voici la terrible épreuve à laquelle Angélique Villeneuve a dû se soumettre. Mariée, mère de deux filles et d’un fils, elle a retrouvé ce dernier pendu dans sa chambre par un matin de septembre. Un matin lors duquel tout a basculé, où sa vie a irrémédiablement changé. Qui est-elle maintenant ? Un enfant sans parent est un orphelin, mais perdre la chair de sa chair est une situation tellement anormale qu’il n’y a pas de mot à mettre sur cette tragédie dans la langue française. Des raisons pour lesquelles son fils a décidé de mettre fin à ses jours, nous ne saurons rien ; l’auteur estime que cette histoire ne lui appartient pas. Ce qu’elle va coucher sur papier, c’est sa vie d’après, emplie de l’absence de cet être qu’elle aimait tant, et de la nécessité de se reconstruire malgré tout.

Nuit de septembre est un ouvrage assez déstabilisant, puisque, par le procédé narratif en place, le lecteur ne peut que se sentir concerner. Bien évidemment, la douleur ressentie par cette mère est inimaginable, mais l’on en a un aperçu, car nous avons l’impression qu’elle s’adresse à nous. En effet, elle raconte sa propre histoire en s’interpellant elle-même par le recours au pronom personnel « tu ». Ainsi, nous pouvons par exemple lire : « Tu t’es posé cette question-là. Tu as dit que tu ne savais pas si, encore, tu pouvais dire, j’ai un fils. »

Dans ce récit autobiographique, point de passage larmoyant. Le propos est avant tout la reconstruction de cette mère brisée, qui doit parvenir à continuer malgré tout, car elle a deux filles et un mari qui l’aiment et qui ont besoin d’elle. Sa passion pour l’écriture lui est sans doute salutaire, et bien que l’on ne doute pas une seule seconde de la souffrance abominable qui l’accompagne au quotidien, même si le deuil qu’elle doit faire est impossible à surmonter, il y a beaucoup de grandeur dans cette femme. Elle ne désire pas cacher les faits, elle ne veut pas passer des mots sous silence, que les gens autour d’elle s’empêchent d’employer certains termes en sa présence.

Les chapitres, qui n’en sont pas vraiment, sont très courts (une ou deux pages généralement) et on découvre ainsi les petits pas qu’elle fait chaque jour pour aller de l’avant, même si parfois, elle aura davantage l’impression de faire marche arrière. Les premières fois depuis que son garçon n’est plus, une discussion avec une commerçante, les idées qui lui viennent lorsqu’elle voit un adolescent faire du skate… La plume est juste, aucune fausse note ici, mais surtout – et avant tout – beaucoup de respect et de pudeur pour cet enfant qui n’est plus, mais également pour sa famille. En effet, elle ne dévoile jamais l’identité de son époux ni de ses filles, et le prénom de son fils n’est connu du lecteur que dans les dernières pages. Nuit de septembre est à n’en point douter un très bel ouvrage qui, malgré tout, est d’une certaine façon porteur d’espoir.


mardi 7 juin 2016

Ta façon d'être au monde, Camille ANSEAUME



Quatrième de couverture :

« C’est l’heure du départ. Il faut rentrer. Dans la chambre, je reste transie, incapable de bouger. C’est l’angoisse et les regrets qui me paralysent. Je comprends que je n’ai pas pris le temps de défaire mes valises, ni même de regarder à la fenêtre. Maintenant que je réalise qu’on y voit la mer, il est temps de m’y arracher. Le séjour est passé sans moi. J’étais là, et je ne le savais pas. J’en conçois une tristesse et une culpabilité infinies, sans commune mesure avec les faits. Tu connais ce rêve étrange que je t’ai souvent décrit. 
Il m’a hantée chaque nuit pendant des années. Et puis un jour je ne l’ai plus fait.
Ce jour-là, j’ai compris que l’été avait duré vingt-six ans. »
Elles sont amies d’enfance. L’une est inquiète rêveuse, introvertie ; l’autre est souriante, joyeuse, lumineuse. Ensemble, elles grandissent, découvrent la vie, l’amour. Jusqu’à ce qu’un drame bouleverse le monde qu’elles se sont bâti...

234 pages, Éditions Kero, janvier 2016



Ce que j’ai pensé de cette lecture :

Elles sont amies depuis leur plus tendre enfance et totalement aux antipodes l’une de l’autre. L’une est « elle », appelée aussi « la petite fille », plutôt introvertie et peu sûre d’elle. Elle est la narratrice du roman. L’autre est « tu », plus lumineuse, qui ne tardera pas à devenir un réel modèle pour « elle ». Après une enfance au cours de laquelle elles seront inséparables, arrive l’adolescence, puis l’âge adulte. Elles font désormais partie d’une bande d’amis, vivent leurs premiers amours… Jusqu’à ce qu’un drame éclate. Le deuxième chapitre du roman s’ouvre alors, et « elle » devient « je ». La narratrice – dont le prénom ne nous sera jamais dévoilé – va être là pour sa meilleure amie, et ensemble, elles vont tenter de traverser une douloureuse épreuve. Les deux femmes en ressortiront-elles plus fortes et plus soudées ?

Tout d’abord, je dois dire que la manière dont est rédigé ce livre m’a quelque peu prise au dépourvu. En effet, la première partie raconte l’histoire de « elle » et de « tu », sachant qu’« elle » est aussi la narratrice. En bref, ce n’est pas toujours facile à suivre, et cela m’a sans doute empêchée de me plonger pleinement dans l’histoire, car j’avais beaucoup de mal à m’y retrouver. Dans la première moitié du roman, nous sont donc présentés un certain nombre de souvenirs et de petites anecdotes, nous permettant de faire la connaissance de ces deux enfants et de leur entourage, mais aussi de leurs fêlures. 

Puis arrive la deuxième partie de l’ouvrage, qui s’ouvre sur un drame. Mais surtout, sur un changement de focalisation narrative, grâce à l’emploi du pronom « je ». Dès lors, il est beaucoup plus facile de suivre le récit, mais aussi de s’émouvoir. C’est à partir de ce moment que j’ai apprécié pleinement l’ouvrage. J’ai eu le cœur serré à la découverte des divers évènements, et Camille Anseaume parvient à décrire à merveille la plongée de ses protagonistes dans le monde adulte.

Il est ici question d’amour, d’amitié, de famille, de solidarité, d’entraide… Un membre de ce groupe d’amis va mal, et tous se réunissent autour pour être présents et je le soutenir dans l’épreuve que lui fait subir la vie. Chacun va, à sa façon, lui apporter un peu de réconfort, commettant parfois un faux-pas, ayant une parole malheureuse, mais cela part toujours d’une bonne intention. Cette bande d’amis est une vraie famille de cœur, et chacun aura sans doute envie d’en avoir une semblable.

Pas de suspens à proprement parler dans cet ouvrage, bien que je dois reconnaître que je ne m’attendais absolument pas à la fin qui nous est proposée par l’auteur. C’est plutôt une tranche de vie réaliste et émouvante pour le lecteur. Je regrette seulement le parti pris narratif de Camille Anseaume, car j’aurais sans doute bien plus apprécié Ta façon d’être au monde si la première partie du roman avait été plus accessible. 


vendredi 3 juin 2016

Le Sommeil le plus doux, Anne GOSCINNY



Quatrième de couverture :

« Son sourire aujourd’hui me donne envie de découvrir le monde. Elle oublie, je le vois, l’échéance des trois jours. Elle oublie que le temps est compté elle oublie l’ombre et son murmure.
Il fait doux, Nice ouvre ses cadeaux. Il n’y a personne dans les rues. Je marche, enveloppée dans un caban trop large. Je ne pense qu’à ma mère. Je sais que la parenthèse se referme sur nous. Ma promenade, au gré du vent, au gré de rien, me conduit dans un joli jardin. Je m’assieds sur un banc, déboutonne mon manteau. Je respire. Trois pastels et mon carnet vont immortaliser le bleu, le vert et l’ocre.
C’est alors que je remarque cet homme. Il est là tout près, assis sur un banc. Il me regarde. Il se lève. Vient vers moi. »

144 pages, avril 2016, Éditions Grasset



Ce que j’ai pensé de cette lecture :

À la veille de Noël, Jeanne part avec sa mère et sa grand-mère en direction de Nice. Cette jeune femme de vingt-cinq ans tente ainsi de répondre aux derniers souhaits de sa mère, puisque ses jours sont comptés. Atteinte d’un cancer, elle a eu beau essayer tous les traitements possibles – même des médicaments encore en phase de test – elle est perdue, et son quotidien n’est plus qu’une souffrance aussi interminable qu’abominable. Jeanne exauce par ce geste le dernier souhait de celle qui lui a donné la vie. En parallèle, il y a Gabriel, marié, père de deux jumeaux, mais qui n’est pas heureux . Sa relation avec ses enfants est très difficile, car ils lui reprochent ses absences et son manque d’intérêt envers eux, alors que son épouse n’occupe plus vraiment cette place dans sa vie, puisqu’elle s’est cantonnée à son rôle de mère et d’artiste peintre. Et grâce au hasard, les chemins de Jeanne et de Gabriel vont se croiser.

La construction narrative du Sommeil le plus doux est particulièrement originale et nous offre une approche très intéressante du récit. Alors que Jeanne nous relate son histoire au présent, avec l’émotion propre à ce qu’elle vit, ses questionnements et ses peurs quant au futur, Gabriel nous relate cela au passé, de nombreuses années plus tard, avec un certain recul sur la situation. Par ailleurs, Gabriel est bien plus âgé que notre héroïne, puisque l’on sait qu’il pourrait être son père. Ils n’ont donc pas la même expérience de l’amour – lui, père de famille ; elle, qui n’a jamais eu de petit ami –, et ils nous proposent des interprétations différentes de leur relation.

La perte de sa mère imminente à laquelle Jeanne tente de se préparer est particulièrement émouvante à lire. D’ailleurs, cette femme aux portes la mort explique à son enfant ce que sera sa vie lorsqu’elle sera partie, et qu’elle n’aura plus personne à appeler maman, « Deux syllabes si bêtes quand elles sont là, tout prêt. Deux syllabes interdites, comme ça, en moins de temps qu’il n’en faut pour mourir ». Mais c’est avec beaucoup de force et d’amour que Jeanne sera présente pour sa mère jusque dans son dernier sommeil. Le tout est porté par une écriture très poétique. Lors du dîner du réveillon de Noël de Gabriel et de sa famille, ses mots m’ont particulièrement plu : « Une table trop garnie, et des sourires absents qui sont bien plus difficiles à gérer que l’absence de sourire ».

Malheureusement, j’ai été très déstabilisée par la fin de l’ouvrage, remettant en question la présence d’un personnage : était-il réellement là où Jeanne percevait-elle un fantôme ? À moins que ce fût le produit de son imagination ? De plus, le dernier chapitre est très vite expédié, passant très rapidement sur l’apprentissage de la nouvelle vie de Jeanne, une fois que sa maman n’est plus. J’aurais aimé en savoir davantage, qu’Anne Goscinny prenne le temps de nous expliciter les faits, car tout nous est livré « en bloc », et j’ai l’impression de ne pas avoir tout saisi.


mardi 31 mai 2016

Parmi les dix milliers de choses, Julie PIERPONT





Quatrième de couverture :

Dans la famille Shanley : Jack, charmeur impétinent, est un artiste reconnu ; Deb a renoncé quant à elle, avec une certaine allégresse, à une carrière se danseuse de ballet pour élever leurs deux enfants. Un appartement à Manhattan, une famille presque heureuse tant Deb s’applique à fermer les yeux sur les infidélités de son mari. Jusqu’au jour où un paquet anonyme ébranle le foyer : une simple boîte en carton, remplie d’emails chroniquant sans pudeur la vie secrète de Jack. Le paquet, adressé à Deb, tombe malencontreusement entre les mains des enfants. Rien ne sera plus comme avant…

324 pages, Éditions Stock, janvier 2016.



Ce que j’ai pensé de cette lecture :

Un matin, Deb reçoit un carton contenant les échanges de Jack, son mari, avec sa maîtresse. Cette dernière a souhaité se venger de son amant et faire éclater leur relation au grand jour. Mais ce qui n’avait pas été prévu, c’est que Simon et Kay (quinze et onze ans), les enfants du couple, tombent sur ce paquet et lisent cette prose édifiante. Simon est immédiatement dans une colère noire contre son père, n’hésitant pas à clamer au voisinage que ses parents vont entreprendre les démarches nécessaires au divorce. Kay est plus en retrait, ne comprenant pas le sens des mots qui sont employés, et les utilise à son tour, ce qui la fait passer pour ce qu’elle n’est pas. Deb, quant à elle, est impuissante. Elle était au courant de la relation extraconjugale qu’entretenait Jack, et avait choisi de fermer les yeux jusqu’alors. Mais maintenant que sa progéniture sait tout, il va falloir agir...

Je trouvais l’idée de base vraiment intéressante : découvrir comment peuvent être impactés les enfants par les erreurs de leurs parents. Comment grandir au sein d’une famille qui se déchire ? Quelles décisions prendre pour l’épouse trahie, qui est aussi une mère ? Doit-elle penser à ce qu’il y a de mieux pour elle, ou à ce qui est préférable pour les enfants ? Et le père dans tout ça, qui a failli à son engagement, comment parvient-il à vivre avec le poids de sa famille brisée sur la conscience ? Cet ouvrage qui est construit en quatre parties nous offrait un début prometteur. L’accent était mis sur les ressentis et la psychologie des personnages.

Malheureusement, à compter de la seconde partie, les choses se gâtent, et à mon sens, l’ouvrage perd clairement de son intérêt. On n’est plus du tout dans quelque chose ayant trait à la psychologie et à la capacité des protagonistes à vivre après un évènement choquant, mais nous tombons dans un livre appartenant au genre chick lit, porté par une écriture fluide. Les personnages sont alors devenus fades, et ce qui pouvait leur advenir m’a beaucoup moins intéressée. Je n’ai rien contre ce genre de littérature, mais dans le cas présent, j’attendais autre chose que de découvrir les vacances de cette famille et les premiers émois amoureux de Simon.

Je n’ai pas été particulièrement séduite par les personnages, et pour la plupart, j’ai eu plus d’une fois envie de leur mettre des gifles. Le père, qui brise son foyer, la mère, qui est perdue et semble incapable de prendre une décision, le fils, qui joue les adultes… Finalement, c’est peut-être la fillette de onze ans la plus mature de tous. Je dois reconnaître que j’ai plusieurs fois envisagé d’abandonner cette lecture, mais je l’ai poursuivie, espérant que j’allais retrouver ce qui avait éveillé mon intérêt dans le premier quart du roman… en vain. Je suis un peu déçue de la tournure qu’a prise Parmi les dix milliers de choses, car ce récit avait un réel potentiel.


vendredi 27 mai 2016

Bellevue, Claire BEREST





Quatrième de couverture :

Alma se réveille à quatre heures du matin. Dans un hôpital psychiatrique. Deux jours plus tôt, elle fêtait ses trente ans. Écrivain prometteur, Alma est une jeune Parisienne ambitieuse qui vit avec Paul depuis plusieurs années ; tout lui sourit. Et, d’un coup, tout bascule. Son angoisse va l’emporter dans une errance aussi violente qu’incontrôlable et la soumettre à d’imprévisibles pulsions destructrices. Que s’est-il passé pendant ces quarante-huit heures ?

198 pages, Éditions Stock, janviers 2016



Ce que j’ai pensé de cette lecture : 

Alma est internée dans un établissement psychiatrique, au sein duquel on lui administre des médicaments à haute dose. Elle vient de fêter ses trente ans, de tromper Paul, son compagnon, avec un auteur qui a remporté le prix de Flore, et semble décidée à tout envoyer valser. Dépressive – ou tout du moins victime de terribles crises d’angoisse –, elle paraît éprouver le besoin de se faire du mal physiquement, comme si elle souhaitait que le monde entier soit témoin de sa souffrance intérieure. Par le biais d’une narration alternant entre les moments à l’hôpital et ceux ayant précédé cet internement, nous allons découvrir les différents concours de circonstances qui ont conduit Alma dans ce centre psychiatrique.

Tout d’abord, il faut insister sur l’écriture de Claire Berest. Plus encore que le récit qu’elle nous propose, j’ai beaucoup aimé son style, ses phrases longues, mais hachées par la ponctuation, qui traduisent un sentiment d’essoufflement. À travers la narration, on sent qu’Alma perd pied, que nous sommes dans une écriture de l’urgence, qu’elle doit en dire le plus possible et le plus vite possible. C’est le premier roman que je lis de cet auteur, et dès les premières pages, j’ai su que j’allais apprécier la façon dont elle emploie la langue de Molière.

Dans Bellevue, l’écrivain s’intéresse à un grand nombre de thématiques : l’angoisse, la perte de repères, la remise en question quant à savoir qui on est et ce que l’on veut, la folie, la carrière, mais il est aussi question d’amitié, d’amour, de sexe (c’est pourquoi ce livre n’est pas à mettre entre toutes les mains), ou encore de littérature. Ainsi, Claire Berest imagine un prix littéraire lors duquel le jury voterait pour des ouvrages en ignorant tout de l’identité des auteurs. Alma, qui a publié un premier roman, fera d’ailleurs la rencontre d’un éditeur vouant un véritable culte à Julien Gracq, qui avait décliné le prix Goncourt qui lui avait été décerné.

Au fur et à mesure que nous tournons les pages, nous plongeons toujours davantage dans l’enfer d’Alma, qui semble glisser vers la folie. Les passages à l’hôpital nous présentent une femme fragile, peu sûre d’elle, diamétralement opposée à celle qui est prête à sauter sur le premier venu, qu’il soit son futur éditeur ou un inconnu rencontré dans un bar. L’auteur n’hésite pas à employer des mots crus, insistant ainsi davantage sur le mal-être de son héroïne, en « choquant » le lecteur par le recours au vocabulaire utilisé. Bellevue est donc un récit que l’on pourrait qualifier de dur, mais surtout un ouvrage très intéressant de par la variété des thèmes abordés et la façon dont ils sont développés.