dimanche 29 novembre 2015

Le Passeur, Lois LOWRY




Quatrième de couverture :

Dans le monde où vit Jonas, la guerre, la pauvreté, le chômage, le divorce n’existent pas. Les inégalités n’existent pas. La désobéissance et la révolte n’existent pas. L’harmonie règne dans les cellules familiales constituées avec soin par le comité des sages. Les personnes trop âgées, ainsi que les nouveau-nés inaptes sont « élargis », personne ne sait exactement ce que cela veut dire. Dans la communauté, une seule personne détient véritablement le savoir : c’est le dépositaire de la mémoire. Lui seul sait comment était le monde, des générations plus tôt, quand il y avait encore des animaux, quand l’œil humain pouvait encore voir les couleurs, quand les gens tombaient amoureux. Dans quelques jours, Jonas aura douze ans. Au cours d’une grande cérémonie, il se verra attribuer, comme tous les enfants de son âge, sa future fonction dans la communauté. Jonas ne sait pas encore qu’il est unique. Un destin extraordinaire l’attend. Un destin qui peut le détruire.

221 pages, Éditions L’École des loisirs, octobre 2011



Ce que j'ai pensé de cette lecture :

Dans un monde futuriste, que l’on ne sait pas réellement situer d’un point de vue spatio-temporel, l’Identique règne. Les couleurs ont disparu, les sentiments et les souvenirs de même. Jonas, bientôt douze ans, vit avec ses parents et sa jeune sœur. Il n’est bien sûr plus question de parents biologiques ici, puisque les enfants voient le jour grâce à des mères porteuses, puis sont confiés à leur famille à l’âge d’un an. Lors de la cérémonie des douze ans, chacun découvre le métier pour lequel la société a décidé de le former. Jonas sera le dépositaire de la mémoire, le seul individu qui a la lourde tâche de recevoir les souvenirs du monde entier. Mais est-il prêt à affronter une telle mission ? 

Dans ce récit, nous sommes en présence d’un monde on ne peut plus aseptisé : les paysages sont plats, le climat est constant, les couples sont formés par des tiers puisque l’amour n’existe plus, chaque famille se voit attribuer deux enfants, ni plus ni moins, les bébés sont élevés par des nourriciers pendant leur première année, les personnes âgées vont dans des maisons qui leur sont destinées, et toute la communauté vit selon des règles établies. Personne n’est maître de son avenir, et la question du libre arbitre se pose très clairement.

Par ailleurs, le fait de vivre sans souvenirs, sans sentiments, déshumanise les personnages, qui ne sont ni bons ni mauvais, mais totalement neutres. Les enfants jouent à la guerre sans même s’en rendre compte, puisqu’ils n’en ont pas connaissance. Même la mort ne semble pas exister, puisque suite à la cérémonie de l’élargissement, les individus se rendent vers un Ailleurs, mais personne ne sait réellement de quoi il s’agit. 

Grâce au précédent dépositaire de la mémoire, le « passeur », celui qui est chargé de former et de transmettre tous ses souvenirs à Jonas, notre jeune héros, qui va prendre conscience de tout ce qui manque à son monde. Cela aura bien évidemment pour conséquence de changer sa perception de sa communauté, de ses proches, etc. Le précédent dépositaire de la mémoire, un homme très âgé, va tenter de l’accompagner au mieux dans cet apprentissage, bien qu’il sache que celui-ci sera douloureux et source de déconvenues. 

Même s’il s’agit d’un bon ouvrage et que j’ai passé un agréable moment à la lecture du Passeur, je dois bien avouer que je trouve à redire sur certains points. Par exemple, l’âge du héros, qui a seulement douze ans lorsqu’on lui confie une des missions les plus importantes de sa communauté, et qui a des réflexions un peu trop poussé pour un préadolescent. Par ailleurs, de nombreuses questions restent en suspens : comment cette communauté a-t-elle vu le jour ? Pourquoi ? Quant à la fin, elle est relativement rapide, voire presque bâclée. Tant de questions restent sans réponse…



mercredi 25 novembre 2015

Le Cherche-bonheur, Michael ZADOORIAN




Quatrième de couverture :

Pour John et Ella, soixante ans de mariage au compteur, c’est l’heure de la grande évasion ! Bravant l’interdit familial et médical, ils quittent Detroit à bord de leur camping-car, direction la Californie, via la mythique route 66. L’un a la mémoire qui flanche, l’autre le corps en déroute, mais il n’est jamais trop tard pour partir à la conquête de son bonheur ! 

288 pages, Éditions 10-18, octobre 2011



Ce que j’ai pensé de cette lecture : 

Âgés de plus de quatre-vingts printemps, Ella est atteinte d’un cancer et John perd de plus en plus la tête. Contre l’avis des médecins et malgré les vives protestations de leurs enfants, ils décident de partir en voyage à bord de leur camping-car, le « Cherche-bonheur ». Ensemble, ils quitteront Detroit, dans le Michigan, avec pour objectif de rejoindre Disneyland, en Californie, en suivant la célèbre route 66. Ce voyage sera pour eux l’occasion de revivre des moments de leur passé, mais aussi de profiter pleinement du présent. 

Les deux personnages principaux sont très attachants. La narratrice de l’histoire est Ella, une femme au fort caractère. Elle approche de la fin de sa vie et souhaite la mener comme elle l’entend, et non pas comme le voudraient des tiers, revisiter ces endroits où ils s’étaient rendus par le passé, comme si elle souhaitait remarcher sur leurs pas, revivre leur histoire. Dans Le Cherche-bonheur, l’auteur mêle donc habilement deux thèmes : la vie et la façon dont on peut profiter du temps qui nous est imparti. 

Ella est donc la guide, et John le pilote, ce qui a de quoi effrayer leurs deux enfants, qui ne manquent pas de les supplier de rentrer à chacun de leurs appels. Ella souffre physiquement, mais elle est déterminée à profiter de ce voyage qu’elle sait être le dernier, le faire pour elle et pour son mari, même si ce dernier ne sait pas toujours où il se trouve et qu’il oublie des choses fondamentales. Par ailleurs, elle doit aussi subir les sautes d’humeur de John, qui s’expliquent par la maladie qui le touche, mais avec lesquelles elle doit composer. Cela prête le plus souvent à sourire, car John finit généralement par oublier ce qui l’a contrarié, et Ella fait alors comme si de rien n’était. La maladie est loin d’être au premier plan ; elle est présente en fond, nous rappelant la fragilité de la vie.

C’est un ouvrage émouvant, grâce aux souvenirs qui s’imposent à eux, à cette vie qu’ils évoquent lors de discussions, mais surtout à cause de ce bel et sincère amour qui les unit encore après plus de soixante années de mariage. Ce road-trip, qui connaît néanmoins quelques désagréments, nous permet de découvrir quelle fut leur vie, avec leur regard de personnes d’un certain âge et le recul qu’ils peuvent avoir – même si l’âge n’est pas toujours synonyme de sagesse. Quant à la fin, je ne dirai que ceci : bouleversante.